04 août 2012

Beaucoup de Sharm


Dans le Vieux Sharm, on est tout de suite accueilli par l'encens allumé pour attirer les clients. Des marchands de toute sorte y tiennent boutique. Il y a les confectionneurs de desserts dont celui qui fabrique devant les passants les filons de blé servant à préparer le koufana. Il y a ceux qui offrent des tapis orientaux et celui qui vend à l'agnabi (ou le gringo des Égyptiens) le privilège de prendre une photo de son chameau, ou mieux encore de faire un tour sur son dos. Il y a le marchand d'épices de toutes les couleurs et celui qui importe de l'Inde de jolis foulards de soie. Il y a aussi celui qui a voulu nous vendre une chouette lampe en forme de girafe faite d'une noix de coco. Parfaite pour la chambre de Karim.



Yasser demande au marchand:



- Tu la fais combien?



- 85 livres.



- T'es malade ou quoi?

Yasser s'éloigne déjà. Et moi qui le rattrape:

- Il a dit combien? Demande-lui si elle a été fabriquée en Égypte.

- Non, ça vient de Thaïlande.

- Ah... Bon, on oublie ça. 

Le vendeur nous lance un appel de la dernière chance:

- Ça fait deux jours que j'ai rien vendu. Je vous la fais pour 80 livres.

J'avais envie de le croire, d'autant plus qu'après lui on a vu un autre marchand de lampes. Et un autre encore. Il faudrait une soirée complète pour visiter toutes les boutiques qui bordent les ruelles sinueuses, mais on a vite fait le tour de l'éventail commercial. 

Le marché est reconnu pour son poisson. Normal, dans une région côtière. Tant le vacancier bien informé que la population locale fréquentent Faris, le meilleur resto du Vieux Sharm.  Nous y sommes allés un peu avant le crépuscule afin d'éviter de le trouver bondé par les familles s'y rassemblant pour le repas d'Iftar. À notre arrivée, il n'y avait encore personne assis aux tables,  mais sur plusieurs d'entre elles humus, tahini, tzaziki, salade et pitas attendaient d'être dégustés. Du jus de tamarin, la boisson de choix pour rompre le jeûne, trônait aussi sur les tables déjà mises. Une bonne dizaine de serveurs poireautaient à l'arrière du restaurant, les yeux rivés sur la porte par anticipation des clients attendus. Trois d'entre eux sont venus à notre rencontre, nous ont assis promptement puis tendu le menu.  Notre allure trahissant sans doute nos allégeances, on ne nous a pas offert de tamarin en guise de breuvage.

Nous avons entamé le festin avec une soupe agrémentée de  gingembre dans laquelle flottaient plus de crevettes et de bouts de poisson que j'aurais pu en compter en la brassant. Ensuite est venu un plat de calmars grillés rehaussés de jus de lime. Le plat de résistance est arrivé comme triomphant. Sous la chaude assiette recouverte d'un papier d'aluminium se cachait un sébaste fumant cuit au four avec des pommes de terre et des tomates. D'une main habile, le serveur a rempli nos assiettes en prenant soin de laisser les arêtes dans le plat de service.

Une fois notre poisson englouti, je suis allée à la salle de bain me laver les mains. Un jeune homme m'y attendait et m'a fait signe de mettre les mains sous l'évier. Il a pressé une petite lime au creux de mes mains que j'ai frottées du jus d'agrume. Il a pris ma main gauche et lavé chaque doigt, chaque ongle à l'aide d'une demi-lime puis a ajouté du savon avant de répéter l'opération avec ma main droite. Il a rincé avec un thé chaud et doré dont l'arôme atténue l'odeur de poisson. 

Pendant que nous dégustions, le restaurant s'est vite rempli de clients pressés de s'attabler. Aussitôt assis, les serveurs leur ont apporté ce qu'ils avaient commandés préalablement à leur arrivée. Des bols de soupe aux homards dont les pattes pendaient de chaque côté de leur bol sont apparus un peu partout. De grandes assiettes semblables à la nôtre volaient d'un bord à l'autre du restaurant.

De tout ce que j'ai vu au marché, c'est la clientèle locale de chez Faris qui m'a le plus fascinée. La plupart des Égyptiennes que j'y ai vues portaient des vêtements à la mode et un foulard négligemment enroulé sur la tête.  Même les hommes avaient du style, ce qui en soi est curieux pour l'Égyptien moyen. Est-ce la mer, le contact avec les voyageurs, qui libéralise les mœurs des résidents de Sharm El Sheikh? Je ne sais pas si mes yeux  d'Occidentale m'ont joué un tour, mais je les ai trouvés particulièrement charmants.

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